Située à égale distance de trois grands océans de la planète — atlantique, pacifique et indien — le Kraï1 d’Altaï est une région au riche passé historique, lieu de naissance de plusieurs civilisations.
Après les réformes de l’empereur Pierre le Grand, la Russie fait un grand pas en avant et devient une des plus fortes puissances européennes. C’est à cette époque-là que se construit un petit village nommé par la suite Barnaoul, ce qui veut dire «le grand village».
En 1730, les messagers2 d’Akinfi Démidov (usinier3 de l’Oural recherchant un lieu propice4 pour la construction d’une nouvelle usine) choisissent l’embouchure de la rivière Barnaoulka pour y installer une fonderie de cuivre5. L’Altaï attire Akinfi Démidov non seulement pour ses gisements6 de cuivre mais aussi pour ceux d’argent. En ce temps-là, la Russie ne bénéficie7 pas encore de grands gisements de ce précieux métal ; une seule usine en extrait8 alors, celle de Nertcha9. C’est pourquoi, quand ce minerai est découvert dans la région de la montagne Zméinaia, l’avenir des mines et usines de Démidov est tout tracé.
Les mines Zméinogorskaia sont les plus riches en argent de toute la Russie, et le 1er mai 1747, l’impératrice Elizaveta Pétrovna publie un décret selon lequel les territoires étendus du Sud de la Sibérie occidentale deviennent propriété impériale.
Superficie : 168.000 km2 ou 1,5% du territoire russe
Frontières avec : le Kazakhstan, la République de l’Altaï, la région de Novossibirsk et de Kemerovo.
Population : 2,68 millions habitants dont 52 % urbaine et 48% rurale.
Capitale du kraï : Barnaoul 655.000 habitants
Villes principales : Biisk, Slavgorod, Zarinsk, Zméinogorsk
Au XVIIIe et dans la première moitié du XIXe siècle, on y fond10 90 % de l’argent russe soit 1000 pouds11 par année. La fonderie d’argent de Barnaoul est considérée comme la plus grosse : 13 fours de fusion12 y donnent annuellement près de 450 pouds d’argent. C’est pourquoi en 1771, Barnaoul devient «la ville des montagnes», une des plus grandes villes de Sibérie. L’histoire russe met en avant seulement deux «villes des montagnes» — Ekaterinbourg et Barnaoul.
Les notes de voyage des personnages éminents du XIXe s. qui passent par Barnaoul, témoignent de leur stupéfaction13 devant un niveau élevé d’instruction de son ensemble d’ingénieurs des mines14 et d’officiers ainsi que devant toutes les institutions culturelles qui y sont créées : théâtre d’amateur, musée, bibliothèques…
Barnaoul se distingue très avantageusement des autres villes sibériennes ce qui transparaît15 dans les diverses appellations qu’on lui donne, notamment «L’Eldorado sibérien» et «Le petit coin de Saint-Pétersbourg». Piotr Semionov16 qui travaille ici en 1856-1857, écrit : Barnaoul était incontestablement la localité la plus avancée culturellement parlant de toute la Sibérie, et je l’ai surnommé «L’Athènes sibérienne».
Les quartiers anciens de Barnaoul gardent tous les souvenirs de l’époque où des architectes promus17 par l’Académie impériale de peinture y ont exercé leur art.
Après l’abolition du servage18 en Russie en 1861, beaucoup de paysans viennent s’établir dans cette région devenue prospère. C’est ainsi qu’au début du XXe s. la population rurale y atteint près de 2 millions d’habitants et la surface cultivée s’élève à 2,5 millions d’hectares.
Aujourd’hui les terres agricoles couvrent 11 millions d’hectares dont la plus grande partie sont des terres arables19.
Le climat de l’Altaï est caractérisé par de grandes variations de température et exige des agriculteurs une approche spécifique. C’est la seule région de Sibérie où les tournesols, les graines de soja, les betteraves sucrières peuvent être cultivés.
L’Altaï est une grande région céréalière20. Avec une récolte21 de 4 à 5 millions de tonnes de céréales, l’Altaï est la troisième plus grande de Russie (après Krasnodar et le Tatarstan) et vend environ 1 million de tonnes de céréales par an : blé, avoine, orge, seigle et sarrasin22.
L’élevage23 est une autre activité agricole essentielle de la région, avec des bovins, des porcs, des moutons et des chèvres.
La tradition fromagère de l’Altaï est très ancienne et son industrie possède un important potentiel de développement. L’industrie laitière se développe en Sibérie avec l’ouverture des lignes de chemin de fer Tcheliabinsk-Omsk et Krasnoïarsk-Irkoutsk en 1898. En 1897 déjà, une première usine de fabrication de beurre s’ouvre à Barnaoul. Le premier fromage «suisse» des montagnes de l’Altaï est fabriqué en 1903. C’est à l’initiative de la société anglaise UNION que l’Union des producteurs fromagers de Sibérie organise la production industrielle du fromage «cheddar» principalement destinée à l’exportation. C’est dans l’Altaï que commence en 1932 la production du fromage national le plus célèbre «sovetskii syr». Après la guerre, l’Altaï est une des régions principales de production de fromage de l’URSS; la production est multipliée par 6 entre 1945 et 1962. Parmi les 37 000 tonnes de fromage produites en 1990, on dénombre 4 sortes de fromage de grande taille : sovetskii, suisse, anglais, de montagne ; 12 sortes de fromage de petite taille : rossiskii, hollandais rond, de Barnaoul, Le Sibérien, etc.
Il ne faut pas oublier qu’en plus de son grand dynamisme industriel, l’Altaï est mondialement connu pour sa beauté. En effet, ces trois dernières années, des touristes de plus de 60 pays sont venus admirer ses montagnes exceptionnelles, sa richesse en mineraux et ses innombrables forêts habitées par de nombreux animaux : ours, élans, renards, sangliers ou encore tétras24. L’Altaï est l’eldorado des amateurs de ski, d’alpinisme, de chasse, de rafting et également des passionnés d’histoire et de géographie grâce à sa multitude de monuments archéologiques et ethnologiques.
Après avoir déclaré 2002 l’année internationale des montagnes, l’ONU a sélectionné cinq sites naturels des monts Altaï afin de les insérer dans la liste de l’héritage universel naturel25 de l’UNESCO : les réserves naturelles26 de Katounsky, le lac Teletskoe, le massif de la montagne Béloukha et le plateau d’Ukok. L’Altaï est la quatrième région de Russie après le Baïkal, la Kamtchatka et les forêts de la République Komi, à avoir eu l’honneur de figurer sur cette liste prestigieuse.
материал подготовила Яна Небольсина (Барнаул)
Résumette
Aujourd’hui, cette région sibérienne est surtout réputée pour son agriculture et industrie alimentaire. Or, c’est grâce à l’industrie minière que l’Altaï a reçu la notoriété et un puissant essor économique, car de grands gisements de cuivre et d’argent y ont été découverts au XVIIIe siècle ce qui a permis à Barnaoul, ville capitale de la région, de devenir très vite une localité la plus avancée de toute la Sibérie. L’Altaï est aussi un pays des montagnes exceptionnelles dont la beauté attire les amoureux de la nature de tous les coins du monde.
1 kraï (m) — (русск.) край, приграничная административная единица
2 messager (m) — (зд.) посланник
3 usinier (m) — промышленник, заводчик
4 propice — благоприятный
5 fonderie (f) de cuivre — медеплавильный завод
6 gisement (m) — месторождение
7 bénéficier de — использовать
8 extraire — добывать
9 la Nertcha — Нерча, левый приток реки Шипки (бассейн Амура)
10 fondre — плавить
11 poud (m) — (русск.) пуд, старинная мера веса (16,38 кг)
12 four (m) de fusion — плавильная печь
13 stupéfaction (f) — изумление
14 ingénieur (m) des mines — горный инженер
15 transparaître — (перен.) проявляться
16 Piotr Semionov — Петр Петрович Семёнов-Тян-Шанский (1827-1914) географ, почетный член Петербургской АН, глава Русского географического общества
17 promu (m) — выпускник
18 abolition (f) du servage — отмена крепостного права
19 terres (f, pl) arables — пахотные земли
20 céréalier — злаковый
21 récolte (f) — урожай
22 blé (m) — пшеница, avoine (f) — овёс, orge (f) — ячмень, seigle (m) — рожь, sarrasin (m) — гречиха
23 élevage (m) — животноводство
24 sanglier (m) — кабан, tétras (m) — тетерев-глухарь
25 héritage (m) universel naturel — всемирное природное достояние
26 réserve (f) naturelle — природный заповедник