La capitale culturelle de l’Europe

Cette année, Patras, quatrième ville de Grèce, porte le titre convoité de «capitale culturelle de l’Europe». Malheureusement, les touristes étrangers qui visitent cette grosse bourgade de 200 000 habitants, blottie au fond du golfe éponyme face aux îles de Corfou et d’Ithaque, sont vraiment peu nombreux. Et le fait que l’Union européenne lui ait conféré la dignité de capitale culturelle du Vieux Continent n’y change pas grand-chose.

Chaque année, depuis 1985, la Communauté européenne désigne une ville qui, pendant 12 mois, est censée⁵ devenir le phare culturel du continent. Parfois, deux cités se partagent le titre et la tâche, comme ce fut le cas avec Lille et Gênes, en 2004 et comme ce le sera pour Liverpool et Stavanger (en Norvège), en 2008.

Concrètement, cela se traduit⁶ par l’organisation d’une série de manifestations culturelles où la musique et l’art contemporain occupent la plus grande place. Ce sont souvent des villes de moyenne importance qui postulent⁷ cet honneur (à l’exception de Bruxelles, qui a porté le titre en 2000). Elles y voient une occasion d’élargir leur rayonnement sur le plan touristique. Et aussi de recevoir des subventions⁸ gouvernementales qui les aident à améliorer leurs infrastructures culturelles : agrandissement d’un musée, rénovation d’un théâtre, construction d’une salle de concerts…

Mais sur le plan touristique, les retombées⁹ sont généralement locales : ce sont surtout les résidants du pays et des pays limitrophes¹⁰ qui accourent pour voir une exposition, assister à un spectacle ou encore s’imprégner de l’ambiance.

Une exception notable : Lille. Les artistes invités à l’occasion des cérémonies d’ouverture, avaient joyeusement mis la ville – et les municipalités de l’agglomération urbaine comme Roubaix et Tourcoing – sens dessus dessous¹¹. La rue Faidherbe était transformée en décor de bande dessinée par le bédéiste Jean-Claude Mézières. A Roubaix, la place de l’Hôtel-de-Ville avait été coiffée de bouquets d’arbres suspendus, cimes vers le bas (la Forêt suspendue). Les Québécois Robert Lepage et Louis-Philippe Demers avaient peuplé les quais d’une station de métro de robots. L’art contemporain avait investi les espaces publics pendant que des manifestations plus «traditionnelles» (notamment une grande exposition consacrée à Rubens) colonisaient les musées. C’est sans parler des concerts de musique classique, techno, hiphop, jazz…

A Lille, de folles manifestations artistiques couronnaient 15 ans d’efforts consacrés à la rénovation urbaine et à la revalorisation¹² d’une image oblitérée¹³ par une longue dégradation du tissu industriel. Lille est devenue une ville dynamique et touristique, où les Anglais, les Belges, les Néerlandais et même les Parisiens accourent pour passer le weekend.

L’an prochain, c’est Luxembourg qui reprendra le flambeau¹⁴. Même si la capitale de ce petit Etat qui a rang de grand-duché est située au carrefour de trois des pays les plus fréquentés (la France, l’Allemagne et la Belgique), peu nombreux sont les touristes à y avoir déjà mis les pieds. C’est que¹⁵ Luxembourg n’est pas située sur un des grands axes autoroutiers qui relient les trois pays voisins.

C’est une petite cité – 100 000 habitants avec les faubourgs – fondée au Xe siècle. Elle fut longtemps une ville forteresse et les vestiges de ses remparts et de l’ancienne forteresse sont d’ailleurs classés au Patrimoine de l’humanité par l’UNESCO. Le décor est charmant : la ville est bâtie dans l’étroite vallée de l’Alzette et à flanc de collines. C’est une ville riche (plus de 200 banques y sont représentées tandis qu’elle partage avec Bruxelles et Strasbourg le rôle de capitale de l’Union européenne) qui a su réaménager ses vieux quartiers. Les autorités profiteront de son statut de «capitale culturelle de l’Europe», en 2007, pour essayer de lui ménager¹⁶ une présence sur les itinéraires¹⁷ touristiques. Parviendront-ils à dépasser le succès de curiosité ? L’ennui c’est qu’ils ont choisi de diluer¹⁸ l’impact en associant à l’évènement la «grande région», c’est-à-dire un territoire grand comme deux fois la Belgique, qui englobe toute la Wallonie, la Lorraine française et deux Länder allemands : la Sarre et la Rhénanie-Palatinat. Sur les 500 projets d’expositions, de manifestations, de concerts et de spectacles retenus, la majorité auront lieu dans la «grande région» : à Liège, à Amay, à Mons, à Arlon, du côté belge ; à Nancy et à Metz (une autre ville méconnue des touristes), du côté français ; et surtout à Trèves, la plus vieille et une des plus belles villes d’Allemagne.

Cité olympique en 2004, la quatrième ville grecque est cette année la capitale culturelle de l’Europe. Au programme à Patras, après son grand carnaval en février-mars, concerts, expositions et nombreuses manifestations.

Grand port de Grèce, la ville de Patras a connu un grand coup de pinceau à l’occasion des Jeux olympiques de 2004. Son statut de capitale culturelle européenne en 2006 (après Cork l’an dernier) est une occasion de découvrir cette cité qui en plus de deux mille ans d’histoire a tout connu et en garde des traces architecturales : les Romains, les Francs, les Turcs, les Vénitiens et on en passe.

Patras a deux parties, une ville haute et une ville basse. On peut y visiter entre autres le château, l’odéon romain, le hammam turc qui fonctionne depuis près de cinq siècles, les églises byzantines… Cette année 2006 sera évidemment très riche en évènements culturels et animations, ainsi répartis :

• carnaval, du 21 janvier au 5 mars (tradition annuelle, il est au moins aussi célèbre en Grèce que le carnaval de Nice en France),
• poésie et musique, du 27 avril au 11 mai,
• nouvelle scène du drame ancien, du 19 mai au 4 juin,
• voyager avec… musiques, théâtre, danse et cinéma, fin juin à mi-septembre,
• religion et art, en novembre,
• l’art pour les enfants, du 1er au 31 décembre,
• journées de clôture, les 28, 29 et 30 décembre.

De Patras, les visiteurs peuvent découvrir le Péloponnèse, Delphes et les îles Ioniennes.

Résumette
Chaque année, depuis 1985, la Communauté européenne désigne une ville qui, pendant 12 mois, devient le phare culturel du continent. Cette année, c’est Patras, grand port de Grèce. Son statut de capitale culturelle européenne est une occasion de découvrir cette cité qui en plus de deux mille ans d’histoire a tout connu et en garde des traces architecturales. Au programme, un grand carnaval, concerts, expositions et nombreuses manifestations culturelles qui seront couronnées par les festivités de clôture pendant les derniers jours de décembre.

¹ convoité – желанный
² blottir – прижаться
³ éponyme – одноимённый
⁴ conférer – даровать
⁵ est censé devenir – предполагается, что станет
⁶ se traduire par – выражаться в чём-л
⁷ postuler – быть кандидатом, участвовать в конкурсе
⁸ subventions (f, pl) – субсидии, дотации
⁹ retombées (f, pl) – последствия, результаты
¹⁰ limitrophe (m) – соседний
¹¹ mettre qqch sens dessus dessous – (перен.) перевернуть вверх дном
¹² revalorisation (f) – придание большей значимости, переоценка значения
¹³ oblitéré – стёртый
¹⁴ reprendre le flambeau – перенять эстафету
¹⁵ c’est que – дело в том, что
¹⁶ ménager – устраивать, сооружать
¹⁷ itinéraire (m) – маршрут
¹⁸ diluer – разбавить