On associe souvent le qualificatif d'»enfer vert» au territoire Guyanais. On s’imagine un pays invivable, plein de dangers où survivre est un exploit de chaque instant. Mais il ne faudrait pas oublier que des hommes y ont vécu pendant des siècles, heureux avant que «la civilisation» des Blancs n’arrive, ce qui a obligé les Indiens à se réfugier au plus profond du «Grand Bois». Ils y vivent encore habillés seulement du «calimbé», petite pagne en tissu et ne semblent pas en souffrir outre-mesure.
L’enfer vert
La Guyane est la seule possession française située sur le continent sud-américain. Elle est entourée par le Brésil au sud et à l’est, par le Surinam à l’ouest et par l’Océan Atlantique au Nord.
La Guyane s’étend sur 400 km du nord au sud et sur 320 km de l’est à l’ouest. Elle a un climat équatorial humide, du fait de sa position rapprochée de l’Equateur. Les températures moyennes oscillent aux alentours de 27°C. Les alizés soufflent toute l’année, ce qui rend le climat supportable.
Après l’installation des premiers colons à la fin du XVIe siècle, la ville de Cayenne est fondée en 1637 par des Français. Disputée à la France par les Anglais et les Hollandais, la possession française de la colonie est officiellement reconnue en 1677. Au XVIIIe siècle, toutes les tentatives de colonisation massive échouent et, de 1794 à 1805, la Guyane sert de lieu de déportation des opposants politiques (la «guillotine sèche»). Occupée de 1809 à 1817 par le Portugal, la Guyane est ruinée par l’abolition de l’esclavage en 1848. Enfin, la création du bagne de Cayenne (1852) entrave pour longtemps le développement de la colonie, dont journaux et romans véhiculent l’image d’un repaire de forçats envahi par les moustiques. En 1946 (date de la fermeture du bagne de Cayenne) la Guyane devient un département français d’outre-mer.
Très faiblement peuplée (160 000 habitants, résidant essentiellement sur la bande côtière), elle se caractérise par une grande diversité ethnique. L’absence de main-d’œuvre favorise l’immigration d’une nombreuse population d’origine haïtienne ou brésilienne.
La nature Guyanaise se résume en un seul mot: forêt. Elle occupe près de 95% du territoire et renferme la magie et le mystère de la Guyane. La forêt, immense, très dense et au 3/4 inexplorée, est parmi la plus riche de la planète, tant en nombre d’espèces végétales que d’espèces animales. Il est souvent dit en Guyane, qu’il suffit de faire 10 mètres en forêt pour ne jamais retrouver son chemin. Cela n’est qu’une légende, mais certains y sont restés…
Le bois est donc naturellement une des richesses guyanaises. L’angélique, le bois violet ou le courbaril, sont autant de sortes de bois recherchées pour l’ébénisterie ou le travail de marqueterie. On dénombre quelque 5000 espèces de plantes et fleurs différentes! Les bougainvillées, hibiscus, balisiers, flamboyants et autres passiflores témoignent de la richesse et de la diversité florale de la végétation de Guyane.
La faune y est également abondante et variée. Difficile cependant de voir un animal en liberté, mais impossible de ne pas les entendre! Le singe hurleur, le crapaud-buffle, le Ara Macao ou Jacinthe, les Perruches, les insectes en tous genres, autant de musiciens pour un concert particulièrement bruyant! Ce bruit de fond permanent, mélange d’une multitude de sons différents, crée à lui seul la magie des lieux. Le Piraï (appellation du piranha en Guyane), pullule dans les rivières, mais on peut s’y baigner sans soucis. La pêche, qui est pratiquée sur un large plateau continental de 150 à 200 km de largeur, est une des principales ressources du pays. Trois mille tonnes de crevettes sont pêchées tous les ans par des bateaux français et américains.
La plupart des activités sont concentrées sur le littoral, où Cayenne, Kourou et Saint-Laurent-du-Maroni rassemblent l’essentiel de la population. A l’opposé, l’intérieur du pays est seulement habité par de rares communautés d’Indiens. Des aménagements destinés à désenclaver l’arrière-pays sont néanmoins entrepris: une route nationale devrait ainsi relier Cayenne à Saint-Georges de l’Oyapock.
Kourou
Situé à 60 km de Cayenne, Kourou est surtout réputé pour le Centre Spatial Guyanais (C.S.G.). De par sa population c’est la seconde commune de Guyane délimitée au nord par l’Océan Atlantique, dont les vagues viennent mourir sur une belle plage de sable jaune: la plage des Roches.
Les berges du Kourou, large fleuve sinueux, ainsi qu’une partie de ses plages, sont soumises à un phénomène cyclique d’envasement, avec poussées de mangroves, suivi d’un cycle de désenvasement.
Avant l’arrivée des européens, Kourou était peuplé exclusivement d’indiens Galibi. Ils vivaient de la pêche et de la chasse. Vers 1713, s’y installent les jésuites, et construisent en 1728 une église.
Œuvre de Choiseul, ministre de la marine et des colonies, l’expédition de 1763 mal préparée tourne au désastre (plus de 10.000 morts) et porte une atteinte considérable à la bonne renommée de la région. En effet, en quelques mois, 14.000 européens sont déversés dans la région de Kourou, où rien n’est préparé pour les accueillir: ni logements, ni provisions.
Les gens épuisés par la longue traversée, éprouvés par le manque d’hygiène et une nourriture avariée (stockée dans de mauvaises conditions) commencent à tomber malades. Entassés les uns sur les autres, ils ne tardent pas à se communiquer leurs maladies qui feront des ravages. Les épidémies déciment des milliers de personnes.
Les responsables décident d’envoyer sur les îles du Diable les colons les moins malades, pour les isoler des autres. Cette mesure leur est salutaire et l’on décide de débaptiser les îles en îles du Salut.
En 1852, considéré comme le «cimetière des européens», Kourou est désigné pour accueillir le bagne, qui achève de ternir l’image de la contrée. Le premier convoi de déportés est débarqué en avril 1862.
Durant un siècle, jusqu’en 1946, 80 000 forçats sont amenés en Guyane. L’administration centrale du bagne est installée sur l’île Royale, ainsi que l’hôpital (réservé au personnel), l’église et les logements des médecins.
Aujourd’hui tous ces bâtiments sont classés monuments historiques. Il est possible de se rendre sur les îles tous les jours en empruntant la vedette pour la traversée.
Sur le plan de la vie économique, on distingue deux périodes importantes: avant l’installation du C.S.G. et depuis son installation.
Avant 1964, Kourou était un gros village créole d’environ 700 habitants qui vivaient essentiellement de l’agriculture et de l’élevage, avec en appoint la chasse et la pêche. L’installation du Centre Spatial a complètement bouleversé la vie et la physionomie de la région. Il y a eu les expropriations et l’installation des habitants dans la cité du «stade» ou cité des relogés, ce qui constitue un véritable bouleversement dans les habitudes et les modes de vie traditionnels.
Au niveau touristique Kourou possède des atouts incomparables. La ville est surtout connue pour les vestiges du bagne, et aussi pour les îles du Salut. Le bagne n’est pourtant pas ce qui fait le charme de cette belle contrée. En effet la façade atlantique offre au regard un spectacle d’une rare beauté: une belle plage de sable doré stoppée net dans son élan par un magnifique plateau de roches bosselées. L’endroit est surnommé les Roches de Kourou. Le C.S.G., où affluent les visiteurs à longueur d’année, constitue aussi une attraction majeure: visite de la base, spectacle fascinant d’un tir…
Il faudra bientôt ajouter à cela un nouvel atout, le site des roches gravées qui constitue une représentation de l’art rupestre amérindien. Ce site, découvert au début du siècle a fait l’objet en 1993 d’une protection et d’une mise en valeur, en attendant de pouvoir être ouvert au public.
RésumetteArrivés sur la Côte Sauvage au XVII-ème siècle, les Français y fondent la ville de Cayenne (aujourd’hui, le chef-lieu du DOM la Guyane française). Le territoire passe aux mains des Hollandais et des Anglais pour devenir définitivement une colonie française en 1677. Afin d’explorer la forêt immense de la terre nouvelle, le duc de Choiseul y expédie des milliers de colons mais l’entreprise devient un échec retentissant. La Guyane tombe alors dans l’oubli. La France y envoie en déportation les opposants politiques. En 1852, Napoléon III y crée un bagne qui ne sera supprimé qu’en 1946. Le monde de cauchemar, de «l’enfer vert» ainsi évoqué depuis des siècles, doit céder la place au rêve d’autres mondes interstellaires avec l’ouverture en 1964 à Kourou du Centre Spatial, base de lancement des fusées Ariane.