Caroline Lavalley fait ses études de russe et d’anglais à l’université de Nancy. Depuis quatre mois elle travaille comme assistante de l’attaché de coopération pour le français et enseigne la langue française à la faculté des langues étrangères de l’université pédagogique et au gymnase 3 à Samara.
Caroline a très gentiment consenti à nous faire part des impressions qu’elle avait eues pendant son travail chez nous.
Après 4 mois en Russie, le moment est venu de dresser un premier bilan d’impressions sur le système universitaire de deux pays.
Imaginez-vous qu’en France, on compte quelques 300 étudiants dans les amphithéâtres1 et une trentaine dans les cours même dans les filières2 de langues. Chacun n’est donc que l’élément d’une masse anonyme. Ceci peut d’abord s’expliquer par les conditions d’entrée à l’université où seul le baccalauréat — diplôme relativement dévalorisé aujourd’hui — est exigé. Ensuite, un élève de secondaire n’est pas du tout préparé à construire un projet d’études. Dérouté par la complexité des appellations (IUT, BTS, IUP3 ,…) qui reflètent la quantité d’écoles, de filières, d’instituts, nombre d’étudiants se retrouvent en fac d’anglais ou de socio plus par défaut4 que par réelle motivation. En conséquence, il est impossible à un professeur d’université français de suivre le parcours de chacun de ses étudiants contrairement à ici où chaque élève est contrôlé, suivi et a obligation de résultats. En France, l’assiduité5 est rarement vérifiée; elle n’est d’ailleurs pas souhaitable si l’on considère le problème de surcharge des classes. L’étudiant français jouit donc d’une liberté séduisante mais difficile à gérer puisque 40 % des inscrits ne terminent pas leur première année d’étude.
Concernant les méthodes d’ enseignement, on remarque en Russie une culture de l’oral, basée sur la mémoire avec beaucoup d’exercices de répétition, de paraphrase6, de «par cœur», visant à favoriser les automatismes. En France, on insiste plus sur la prise de notes, la cohérence du raisonnement, l’acquisition de méthodes d’analyse afin de donner à l’étudiant la possibilité de travailler seul. Précisons d’ailleurs qu’en dépit7 d’un faible nombre d’heures de cours hebdomadaires, l’étudiant doit fournir un important travail personnel et faire preuve de curiosité pour réussir. Ajoutons qu’en France, on note de 0 à 20, mais la note maximale est rarement accordée sauf peut-être dans les sciences exactes. D’où l’étonnement du Français devant les carnets de «пятерки», car la perfection n’existe pas.
La perfection n’existe pas mais on peut chercher à l’atteindre. Et, entre deux systèmes différents avec leurs failles8 , leurs points forts, développant des compétences différentes, les échanges culturels, éducatifs, économiques, la coopération entre les deux pays dans tous les domaines trouvent toute leur raison d’être.
1 amphithéâtre (m) — лекционная аудитория
2 filière (f) — отделение, факультет
3 IUT — Institut universitaire de technologie, BTS — Brevet de technicien supérieur, IUP — Institut universitaire professionnel
4 par défaut — «по умолчанию», т. е. не имея четкой определенности в выборе; по инерции
5 assiduité (f) — посещаемость
6 paraphrase (f) — перефразирование
7 en dépit de — вопреки
8 faille (f) — слабое место, дефект