Le 14 juillet

Le 14 juillet

La prison de la Bastille était le symbole du mal, de la tyrannie, de l’absolutisme et du despotisme. La prise de la Bastille est devenue le symbole de la victoire du peuple révolté. Mais quels étaient les événements qui se cachaient derrière ses symboles?

La France est en crise politique, économique et financière. Le roi n’est pas capable de la résoudre tout seul et convoque les Etats Généraux. Les députés commencent à discuter la nécessité d’une constitution. Cela ne plaît pas à Louis XVI; il décide de faire appel à la force militaire, et les troupes du roi entourent Paris.

Le 12 juillet, Camille Desmoulins, un jeune homme encore inconnu, appelle le peuple à se révolter contre les troupes du roi massées autour de Paris. Il décrit les Allemands qui composent ces troupes comme prêts à égorger tout le peuple parisien. Les Parisiens prennent peur et courent chercher des armes. Toute la nuit des incendies illuminent Paris.

Le 13 juillet. Les députés soucieux des événements de la nuit envoient une délégation au roi pour le supplier de rappeler ses ministres. Le Roi ignore leur proposition.

Le 14 juillet vers 2 heures du matin, une rumeur2 parcourt la ville: les troupes auraient commencé le massacre3. Pris de panique les Parisiens se ruent4 aux arsenaux des Invalides et s’emparent de plus de 30000 fusils et de 12 canons.

Un cri éclate «A la Bastille!» Cinq ou six cents hommes répètent: «A la Bastille!» Puis, traînant leurs canons, dressant leurs mousquets et leurs piques, ils se portent par la rue Saint-Antoine sur la citadelle. Du Palais-Royal, une autre colonne accourt.

La Bastille. En vérité, l’ancien château de Charles V, avec ses huit tours couronnées de canons rouillés, n’est plus qu’une prison de luxe. Elle est commandée par un galant homme, Jourdan de Launay, qui dispose seulement de 32 Suisses et de 82 invalides.

Alors, le Comité permanent de l’Hôtel de ville, craignant de la populace5, envoie un officier et deux sous-officiers6 demander à Launay de retirer ses canons des embrasures. Le gouverneur fait reculer les pièces7 et retient la délégation à déjeuner. Ne voyant pas revenir ses émissaires, le Comité en envoie un autre, un avocat de Reims, Thuriot, chargé de la même requête8. Thuriot outrepasse9 sa mission et appelle la garnison à se rendre. Launay promet de ne pas faire feu sur la foule, si elle n’attaque pas.

A 1 heure et demie, un millier d’hommes en armes entourent la forteresse et derrière eux un océan de badauds10. Des coups de feu partent ça et là. La foule crie tout le temps: «Nous voulons la Bastille!» On propose d’y mettre feu. Cependant 2 anciens soldats se faufilent11 jusqu’au toit du mur extérieur de la forteresse et abattent à coups de hache le pont-levis qui donne accès à la première des deux cours. Les plus enragés s’y précipitent. Launay alors commande de tirer. Le peuple crie à la trahison12, car il croit que c’est Launay qui a fait lui-même abaisser le pont-levis pour attirer les assaillants13 dans un piège.

A ce moment — il est 4 heures — le siège devient sérieux. 300 gardes-françaises sont arrivés, conduits par un officier, Elie et un ancien sous-officier, Hulin. Sous le feu des défenseurs, ils pénètrent dans la cour. Deux canons sont braqués14 contre le second pont-levis et commencent à tirer.

La garnison de la Bastille se divise: les Suisses seuls veulent résister, les invalides ne pensent qu’à se rendre. Launay songe à faire sauter15 sa poudrière16. Deux invalides, Ferrand et Béquart, l’empêchent. Le gouverneur se résigne17 alors à capituler. Elie et Hulin donnent leur parole qu’il ne sera fait de mal à personne. «Bas le pont!» crie le peuple impatient…

Le pont tombé, la foule se rue dans la cour intérieure, s’empare des officiers et délivre les 7 prisonniers: 4 faussaires18, 2 fous et 1 sadique qu’il faudra le lendemain remettre sous clef.

Traîné à la place de Grève, tête nue, Launay, en dépit19 des généreux efforts de Hulin, est massacré. Le garçon cuisinier20 Desnot lui coupe la tête avec un canif. Sont tués aussi au désespoir d’Elie qui les défend en vain21, le major de Losne, l’aide-major Miray, le lieutenant Person et 3 invalides, parmi lesquels ce Béquart qui pourtant avait empêché le gouverneur de faire sauter la Bastille.

Soûle22 d’une si facile victoire, fière de ses drapeaux souillés23 et des 5 ou 6 têtes fichées sur les piques, la populace se jette alors sur l’Hôtel de ville pour accuser et tuer le prévôt Flesselles. Sa tête, sur une pique, va voisiner avec celle de Launay.

Paris n’est pas très fier: il éprouve surtout de l’angoisse24. Des bandits et des filles dansent dans le jardin du Palais-Royal autour des têtes coupées. C’est beaucoup moins une victoire du peuple qu’une victoire de la canaille25.

2 rumeur (f) — слух
3 les troupes auraient commencé le massacre — будто войска начали резню
4 se ruer — ринуться
5 populace (f) — (презр.) чернь
6 sous-officier (m) — унтер-офицер
7 pièce (f) — (здесь) орудие
8 requête (f) — ходатайство
9 outrepasser — выйти за рамки, превысить
10 badaud (m) — зевака
11 se faufiler — пробираться, проникать
12 crier à la trahison — кричать о предательстве
13 assaillant (m) — нападающий, атакующий
14 braquer — нацеливать
15 faire sauter — взрывать
16 poudrière (f) — пороховой склад
17 se résigner à — смиряться с… , покоряться
18 faussaire (m) — фальшивомонетчик
19 en dépit de — вопреки, наперекор
20 garçon (m) cuisinier — помощник повара, поварёнок
21 en vain — тщетно, напрасно
22 soûl, e [su, sul] — опьяненный, пьяный
23 souillé — запятнанный
24 angoisse (f) — тревога, страх
25 canaille (f) — сброд

Sergey:
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